Il suffit de demander! Les patients veulent que les médecins leur parlent des questions de fin de vie

Nous comptons sur eux pour nous donner tous les faits, mais les médecins semblent éviter de discuter avec leurs patients d’un sujet inconfortable pourtant si important, soit la façon dont nous voulons mourir. L’étude « ACCEPT » — un projet toujours en cours s’intéressant aux soins offerts aux patients âgés gravement malades soignés dans douze hôpitaux de soins de courte durée d’un bout à l’autre du Canada — a cerné un certain nombre d’obstacles nuisant aux discussions concernant la fin de vie entre les médecins et les patients. Résultat : beaucoup de gens reçoivent des traitements inutiles ou qu’ils ne veulent pas.

« Malgré le fait que la plupart des patients préfèrent recevoir seulement des soins pour assurer leur confort en fin de vie, on a de plus en plus recours à des interventions de maintien en vie en phase terminale », d’expliquer le Dr Heyland, chercheur principal de l’étude ACCEPT. « Il est clair qu’il existe un problème de communication entre les médecins, les patients et les familles. »

Publiés dans le numéro d’avril 2013 du Journal of the American Medical Association (JAMA) — Internal Medicine, les résultats préliminaires de l’étude indiquent que les préférences réelles des patients en matière de soins de fin de vie ne sont indiquées dans les dossiers que dans 30 % des cas. Par exemple, même si 28 % des patients ayant participé à l’étude ont dit ne vouloir que des « soins de confort » (aucun traitement visant à prolonger la vie), ces volontés ont été consignées dans seulement 4 % des dossiers.

Un grand nombre de patients interrogés ont dit que l’information nécessaire à la détermination de leurs volontés de fin de vie était insuffisante ou difficile à comprendre. « Je n’ai pas compris exactement ce que le médecin me disait quand il m’a demandé, à la salle d’urgence, si je voulais la RCR », se rappelle un participant de l’étude. « Il m’a posé la question sans rien m’expliquer d’autre. J’ai dit ‘d’accord, si ça peut m’aider’, alors il a coché OUI sur son formulaire, et m’a ensuite dit que ça ne m’aiderait probablement pas, et que ça pouvait même causer des problèmes de fonctions cognitives. Mon Dieu! Je ne voulais pas ça! Il fallait expliquer d’abord, et ensuite poser la question! »

« Je n’en sais pas assez sur son état de santé, ce à quoi m’attendre et combien de temps il lui reste », raconte un proche d’un patient. « Je fais de mon mieux, mais je n’ai pas de compétences médicales; je dois prendre toutes les décisions seul, et je me sens dépassé par tout ça. »

La planification préalable des soins — une démarche de communication de nos volontés entourant les soins de fin de vie, et la désignation d’un mandataire qui pourra parler en notre nom si on en devient incapable — est une autre occasion ratée. Et bien que près de 48 % des patients aient préparé un plan préalable de soins et que 73 % aient nommé un mandataire, seulement 30 % d’entre eux en ont parlé à leur médecin.

Le Dr Heyland participe également à une étude intitulée « DECIDE », un projet complémentaire financé par les IRSC se penchant sur la planification préalable des soins et les discussions sur la fin de vie, mais du point de vue des prestataires de soins. Il a aussi travaillé sur le projet « La planification préalable des soins au Canada », à l’élaboration d’une fiche (Il suffit de demander) visant à aider les médecins à discuter de soins de fin de vie avec leurs patients. « Nous savons qu’un nombre considérable de personnes âgées et malades réfléchissent déjà à leurs soins de santé éventuels, indique le Dr Heyland, mais elles attendent que ce soit leur médecin qui aborde le sujet. Aussi, les conversations doivent être compréhensibles, de manière à permettre aux patients et aux familles de prendre des décisions éclairées. Nous devons trouver des façons pour favoriser l’amorce de ces discussions. »